À Besançon, Claude Neuschwander est surtout connu pour son rôle comme dirigeant de la Compagnie européenne d'horlogerie (CEH), qui a repris les activités de l'entreprise Lip entre 1974 et 1976, après un conflit particulièrement médiatisé en 1973. Cette période de la vie de Claude Neuschwander constitue son lien avec le département du Doubs, et le choix de déposer ses archives au sein des Archives départementales du Doubs en découle.
Né en 1933, sa vie se caractérise par sa volonté de concilier une carrière de dirigeant d'entreprise avec les convictions d'un militant chrétien de gauche formé durant l'après-guerre, ce que permet de retracer ce fonds, qui comprend des documents s'étendant sur plus de soixante ans. Étudiant à l'École centrale, il est vice-président de l'Union nationale des étudiants de France (UNEF) entre 1956 et 1958, et y fonde le périodique L'Étudiant de France. Il est ensuite appelé lors de la guerre d'Algérie. Claude Neuschwander rejoint l'entreprise de communication Publicis en 1961. Dans le contexte de l'avènement de la société de consommation, il contribue à apporter une vision plus scientifique du marketing et de la publicité, suivant l'exemple des entreprises nord-américaines. Il gravit progressivement les échelons, devenant ainsi secrétaire général de l'entreprise en 1970. Durant les années 1960, il est notamment responsable des campagnes publicitaires de Lip. Le militant de gauche participe parallèlement au Club Jean Moulin, qui regroupe des personnalités opposées au retour du général de Gaulle et qui cherchent à formuler des idées alternatives. Il est également membre du syndicat des cadres CFDT, et participe à l'invasion du siège du CNPF en mai 1968. À la fin des années 1960, habitant dans un grand ensemble à Sarcelles, et souhaitant que la gestion associe davantage les locataires, il prend la présidence du conseil des résidents.
Devenu un des dirigeants de Publicis, il est appelé par un groupe d'industriels progressistes autour d'Antoine Riboud à prendre la direction d'une entreprise nouvelle, la Compagnie européenne d'horlogerie (CEH), chargée de reprendre les salariés et les activités de Lip. Claude Neuschwander y voit l'occasion de mettre en application ses convictions sociales et économiques. Dans le cadre des accords de Dole, les 830 salariés de Lip sont progressivement réembauchés à partir de mars 1974, pour certains après des périodes de formation. Le nouveau dirigeant essaie de redresser l'entreprise en rétablissant la confiance avec le réseau des revendeurs de montres et en renouvelant l'image de marque de Lip, tout en profitant de l'arrivée des innovations technologiques, comme la montre électronique. Si les débuts sont prometteurs, l'entreprise renoue avec les difficultés à partir de la fin 1975. Commence alors un conflit entre C. Neuschwander et les actionnaires de l'entreprise, qui aboutit à sa révocation en février 1976. L'entreprise dépose le bilan peu après, ce qui occasionne un nouveau conflit.
Après son expérience chez Lip, C. Neuschwander fonde plusieurs cabinets de conseil s'adressant aux organisations syndicales et professionnelles ainsi qu'aux collectivités locales. Le principal, nommé Ten, est créé en 1976 sous le statut de société coopérative ouvrière de production. Il exerce également les fonctions de secrétaire général puis de directeur général de la FNAC de 1980 à 1981.
Parallèlement, il adhère au Parti socialiste en 1977, et écrit ou coécrit plusieurs essais ayant pour sujets les médias ou la démocratie. Cependant, la page Lip n'est pas tournée, et il n'a de cesse de défendre l'entreprise et ses salariés, écrivant plusieurs ouvrages à ce sujet ou participant à de nombreux évènements. Il tient également à défendre sa direction de la CEH face aux accusations de mauvaise gestion ou d'incompétence, estimant avoir été trahi par les actionnaires.
Claude Neuschwander décède en 2023, au moment du cinquantième anniversaire du premier conflit.

Le fonds Claude Neuschwander a été déposé par sa famille.

Ce fonds permet de retrouver l'ensemble des aspects de sa vie, la majeure partie des articles étant consacrés à sa direction de Lip et aux témoignages qui suivront, ce qui montre l'importance accordée par C. Neuschwander à cette expérience, pourtant relativement courte au regard de sa carrière. Les treize premiers articles ont été classés, décrits et commentés par lui-même, afin de défendre sa vision des évènements de Lip ainsi que son action, qu'il estime avoir été injustement critiquée. Cette intervention d'un producteur sur ses propres archives est assez rare pour être soulignée. Elle démontre le rapport particulier qu'il entretient avec les documents qu'il a produits et reçus, et la conception qu'il se fait de leur utilité. En conséquence, bien entendu, les seuls documents éliminés parmi les archives qu'il avait conservées sont des doublons.

À ce jour, le fonds n'est communicable que sur autorisation de la famille de C. Neuschwander.

Voir l'état des sources conservées aux Archives du Doubs concernant Lip : https://archives.doubs.fr/page/lip---etat-des-sources

Gourgues Guillaume, Neuschwander Claude, Pourquoi ont-ils tué Lip ? De la victoire ouvrière au tournant néolibéral, Paris, Raisons d'agir, 2018, 384 p.
REID Donald, Opening the Gates. The Lip Affairs. 1968-1981. Londres, Verso, 2018, 492 p. Traduit de l'anglais par Chuquet Hélène, L'affaire Lip 1968-1981, Rennes, PUR, 2020, 537 p.
http://maitron.fr/spip.php?article147149, notice NEUSCHWANDER Claude, Maurice, Raymond, Jean par Rousselot Michel, version mise en ligne le 9 juin 2013, dernière modification le 6 juillet 2021. 

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